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Il fallait vraiment être idiote pour accepter un marché pareil, se dit Emma tandis que les restes de sa culotte voletaient jusqu’à ses chevilles.
Pourquoi faisait-elle confiance à ce type ? Elle n’aurait pas dû, mais elle n’avait pas le choix. Si elle n’appelait pas au manoir, Annika s’affolerait en apprenant par le pilote de l’avion qu’elle ne s’était pas montrée.
Mais était-ce vraiment ce qui avait motivé sa décision ? Emma craignait que ses raisons n’aient été moins généreuses. Toute sa vie, les hommes lui avaient demandé des choses que sa nature secrète de vampire l’empêchait de leur donner. Celui-là, non. Il savait ce qu’elle était, et il ne lui demandait pas l’impossible : il exigeait…
Une douche.
Pourtant…
Il lui tendit la main. Sans agressivité ni impatience, mais en l’examinant des pieds à la tête de ses yeux dorés, chaleureux quoique perçants. Un petit grognement rauque lui échappa – involontaire, elle l’aurait parié. Comme s’il la trouvait belle.
La taille du colosse n’en était pas moins terrifiante, ni sa jambe moins horrible, mais Emma inspira à fond et, rassemblant plus de courage qu’elle n’en avait jamais eu de toute sa vie, prit la main tendue.
À l’instant précis où elle réalisa vraiment qu’elle se trouvait nue, dans une cabine de douche, en compagnie d’un mâle dément d’une espèce indéterminée et de deux mètres de haut, il l’attira sous l’eau, le dos tourné vers lui.
Puis il s’empara de ses deux mains pour poser la gauche sur le marbre, la droite sur le verre. L’esprit d’Emma tournait à plein régime. Que mijotait-il ? Elle n’aurait pu être moins préparée à affronter une situation pareille. D’ordre sexuel. Il pouvait lui faire ce qu’il voulait, elle serait incapable de l’arrêter.
Lorsque, tout à son affaire, il entreprit de lui savonner le dos et les fesses de ses grandes mains, elle releva brusquement la tête, surprise. Gênée de se donner en spectacle à un inconnu, mais aussi intriguée par son corps à lui. Elle avait beau détourner les yeux de son énorme érection, il avait un sexe… voyant. Elle remarqua aussi que ses poils avaient le bout doré et qu’il était bronzé, sauf la jambe abîmée.
Il se pencha pour continuer le grand nettoyage en lui frottant les genoux, pleins d’herbe et de boue, mais dès qu’il remonta, elle serra les cuisses. Il se redressa avec un grognement de frustration et l’attira contre sa poitrine ; sa verge se pressa contre elle. Enfin, il reprit sa lente exploration, la main refermée sur l’épaule d’Emma.
Soudain, son autre main cueillit doucement un sein. Elle allait se débattre, hurler…
— C’est incroyable comme tu as la peau douce, lui chuchota-t-il à l’oreille. Autant que la soie de ta lingerie.
Elle frissonna. Un compliment, et voilà qu’elle se détendait aussitôt – un peu –, elle qui n’avait jamais pensé être une fille facile. Lorsque le fou passa lentement le pouce sur son mamelon, aller et retour, elle prit une brusque inspiration, soulagée qu’il ne puisse la voir fermer brièvement les yeux. Jamais elle n’aurait cru qu’il existait des sensations aussi agréables !
— Mets le pied là.
Il lui montrait le banc étroit installé contre le mur du fond de la douche.
Écarter les jambes ?
— Euh, je ne crois pas que…
Il l’empoigna par le genou pour lui faire faire ce qu’il voulait puis, quand elle ébaucha un mouvement, l’avertit d’un ton sec :
— Ne joue pas à ça. Bon, pose la tête contre ma poitrine.
Déjà, ses deux mains couvraient les seins d’Emma, sur lesquels ses caresses exerçaient maintenant un certain frottement, car l’eau avait emporté le savon. Elle se mordit la lèvre. Ses mamelons durcissaient au point d’en devenir presque douloureux. Alors qu’elle aurait dû être terrifiée. Avait-elle si désespérément besoin d’un contact – n’importe lequel – pour se soumettre de cette manière ?
Les doigts de son compagnon descendirent un peu.
— Garde les jambes écartées.
Juste au moment où elle allait les serrer. Personne ne l’avait jamais caressée à cet endroit-là. Ni ailleurs, à vrai dire.
Elle n’avait même jamais tenu un homme par la main.
Elle déglutit nerveusement en regardant la grande patte glisser vers son sexe.
— M… mais vous m’avez dit que…
— Que je ne te baiserai pas, oui. Quand je voudrai m’y mettre, tu le sauras, crois-moi.
Au premier contact, elle lâcha un petit cri en sursautant entre les bras qui la retenaient prisonnière, saisie par la puissance de la sensation. Deux doigts massaient sa chair sensible, d’autant plus provocants, d’autant plus délicieux qu’ils se montraient… extrêmement doux. Lents et doux. Lorsque leur propriétaire s’aperçut qu’elle était trempée, il marmonna de sa voix rocailleuse des mots étrangers et promena les lèvres dans son cou, visiblement satisfait de sa réaction.
Pourtant, quand il glissa la main entre leurs deux corps avant de chercher à introduire le doigt en elle, Emma se raidit par réflexe.
— Tu es aussi fermée qu’un poing, murmura-t-il. Il faut te décontracter un peu.
Elle se demanda si elle devait lui dire que toute la décontraction du monde ne changerait rien au problème.
Il se fit plus insistant, la pénétrant en douceur avec le majeur. Un petit cri lui échappa de nouveau tandis qu’elle basculait sur la pointe des pieds, comme pour s’enfuir, mais il plaqua l’autre main sur son ventre afin de la pencher légèrement en avant. Elle s’aperçut alors, à sa grande stupeur, que le halètement qui emplissait la cabine sortait de sa propre bouche.
Le fou la caressait – à l’intérieur – et ça l’excitait.
L’air devenait-il électrique ? À cause d’elle ? Oh, oui, pourvu que ce soit à cause de moi…
Il tremblait de plus en plus fort. Manifestement, il ne se maîtrisait qu’avec peine… Elle aurait dû se méfier, se révolter, mais les doigts qui la massaient se montraient si lents, celui qui s’était glissé en elle si brûlant… Elle ressentait un tel plaisir… inconnu. Un gémissement montait en elle.
Jamais encore elle n’avait poussé de gémissement de plaisir.
Ses griffes s’incurvèrent. Haletante, elle s’imagina les planter dans le dos de son compagnon tandis qu’il s’enfonçait en elle. Mon Dieu, que lui arrivait-il ?
— Voilà… Bien, très bien… lui gronda-t-il à l’oreille. (Il la fit pivoter, puis la souleva de terre.) Mets les jambes autour de ma taille.
Les yeux de la vampire, quasi fermés de plaisir, s’écarquillèrent sous l’effet de la panique.
— Vous… vous m’avez dit que vous ne…
— J’ai changé d’avis en te sentant toute mouillée, tout excitée.
Elle le désirait effectivement… comme elle était censée le faire.
Pourtant, elle se débattit avec énergie. Lachlain fronça les sourcils, perplexe. Si affaibli soit-il, immobiliser Emmaline ne lui fut guère plus difficile que de maîtriser un chat sauvage.
Il la coinça contre le mur, puis entreprit de sucer ses mamelons palpitants, les yeux fermés de plaisir. Lorsqu’il les rouvrit, sans cesser de promener la langue autour des petits boutons roses, ceux de sa compagne étaient clos.
Il la remit debout pour lui caresser l’entrejambe, mais elle s’était de nouveau contractée. S’il essayait de la prendre maintenant, il allait la déchirer… sauf qu’il s’en fichait. Après tout ce qu’il avait fait pour en arriver là, après avoir découvert qu’il était en quête d’une vampire, il n’allait pas se laisser arrêter.
— Détends-toi, cracha-t-il – suscitant exactement la réaction inverse : elle recommença à se débattre, en vain.
J’ai besoin d’elle, songea-t-il. De l’anéantissement. Elle me torture, comme les siens dans les Catacombes. Lachlain poussa un rugissement de rage, tandis que ses poings filaient des deux côtés de la tête de sa captive. Le marbre vola en éclats derrière elle.
Les yeux de la femelle s’écarquillèrent de nouveau. Pourquoi n’appartenait-elle pas à son espèce à lui ? Elle se serait cramponnée à ses épaules pour qu’il la pénètre. Elle l’aurait imploré puis englouti en elle, heureuse, soulagée de le sentir s’engouffrer dans son corps. L’image de la vampire se comportant ainsi arracha à Lachlain un gémissement de douleur : il avait tant perdu… Il l’aurait voulue consentante, mais il prendrait ce qu’il y avait.
— Je serai en toi cette nuit. Tu ferais mieux de te détendre.
Elle leva les yeux vers lui, les sourcils froncés, l’air désespéré.
— Vous m’avez dit que vous ne me feriez pas de mal. Vous m’avez p… promis.
Cette saleté imaginait-elle qu’une promesse pareille la sauverait ? Il saisit sa verge à pleine main, puis tira brusquement la jambe de la créature jusqu’à sa hanche…
— Vous m’avez promis… murmura Emma, effondrée, car elle avait fait confiance à son ravisseur. (Et puis, elle détestait d’autant plus qu’on lui mente qu’elle était incapable de rendre la pareille.) Vous m’avez dit que…
Il se figea. Avant de relâcher la jambe de la jeune femme et de frapper le mur, une fois de plus, en poussant un grondement profond. Après quoi, il la fit pivoter sans douceur. Terrifiée, hagarde, elle allait recommencer à mordre et à griffer quand il la reprit dans ses bras, le dos contre sa poitrine, puis lui poussa la main jusqu’à son érection. Lorsqu’elle la toucha, il inspira brusquement.
— Caresse-moi, ordonna-t-il d’une voix gutturale.
Soulagée d’avoir été graciée, Emma l’empoigna maladroitement, incapable de faire le tour complet de sa verge. Elle resta immobile, hésitante, mais il donna un coup de hanches qui la décida à promener la main sur son sexe en regardant ailleurs.
— Plus fort.
Les doigts crispés, les joues brûlantes de gêne, elle se demanda s’il était tellement évident qu’elle ne savait pas s’y prendre.
— Là, très bien, marmonna-t-il.
À présent, il lui pétrissait les seins en l’embrassant dans le cou. Des râles saccadés montaient de sa vaste poitrine, ses muscles se contractaient, son bras se resserrait autour d’elle à lui couper le souffle, tandis que son autre main descendait envelopper son sexe.
— Je vais jouir…
Un grognement rauque échappa à son ravisseur. Emma posa le regard sur lui… au moment précis où il expulsait sa semence sous la douche.
— Oui, oui…
Il lui écrasait les seins, mais c’était tout juste si elle le sentait, fascinée par son éjaculation ininterrompue.
Quand le jaillissement se tarit enfin, elle s’aperçut qu’elle continuait à le caresser dans une sorte d’égarement. Il lui immobilisa la main, frissonnant, les muscles du torse secoués de spasmes.
Elle perdait vraiment la tête. Elle aurait dû être horrifiée, mais un désir douloureux la tenaillait. Était-ce cette brute qu’elle voulait ?
Le type la radossa au mur intact de la cabine, sous la pomme de douche. Serré contre elle, le menton sur sa tête, les mains des deux côtés de son visage.
— Touche-moi.
— Où… où ça ?
Pourquoi avait-elle la voix aussi rauque ?
— N’importe où.
Lorsqu’elle se mit à lui frotter le dos, il l’embrassa au sommet du crâne, machinalement, comme s’il ne se rendait pas compte qu’il la traitait avec douceur.
Il avait les épaules larges, musclées et puissantes – assorties au reste de son corps. Les mains d’Emma le parcouraient de leur propre volonté, plus sensuellement qu’elle ne l’aurait désiré. À chacun de ses mouvements, ses mamelons douloureux frôlaient les côtes du colosse. Les poils dorés de la poitrine virile lui chatouillaient les lèvres. Elle ne put se retenir de s’imaginer embrassant la peau bronzée. Son sexe trempé palpitait toujours d’un désir avide.
— Tu es excitée. Très excitée, même. Je le sais à ton odeur, murmura son compagnon au moment précis où elle se demandait s’il n’allait pas s’endormir.
Elle prit une brusque inspiration. Qu’est-ce que c’était au juste que cette créature ?
— Vous… vous ne dites ce genre de choses que pour me gêner.
Pourquoi se serait-il exprimé de manière aussi crue, s’il n’avait pas eu conscience de la mettre extrêmement mal à l’aise ? Emma lui en voulait de cette mesquinerie.
— Demande-moi de te faire jouir.
Elle se raidit. Elle n’était peut-être qu’une sale froussarde, sans talent particulier ni haut fait à son actif, mais elle se sentait soudain d’une ombrageuse fierté.
— Jamais.
— Tant pis pour toi. Bon, défais tes tresses. À partir de maintenant, tu ne t’attaches plus les cheveux.
— Je ne veux pas…
Lorsqu’il fit mine de libérer sa chevelure, elle s’empressa de s’en charger elle-même, en s’efforçant de ne pas dévoiler ses oreilles pointues.
Les poumons du colosse se vidèrent d’un coup.
— Attends, montre-moi ça. (Elle demeura muette pendant qu’il repoussait ses cheveux.) On dirait des oreilles d’elfe.
Quand il promena les doigts sur le triangle cartilagineux du sommet, Emma fut traversée par un frisson.
— C’est une caractéristique des femelles, chez les vampires ?
N’ayant jamais vu un vampire de pure race, mâle ou femelle, elle se contenta de hausser les épaules.
— Intéressant.
Sur ce commentaire, il lui rinça les cheveux, sans quitter son visage d’un regard impassible.
— Coupe l’eau, ordonna-t-il ensuite, avant de la tirer hors de la cabine.
Il l’essuya de la tête aux pieds avec une serviette – à un moment, il l’immobilisa même, un bras autour de la taille, pour lui passer lentement le tissu entre les jambes. Elle ouvrit de grands yeux pendant qu’il l’examinait comme un meuble qu’il aurait envisagé d’acheter. Finalement, il enveloppa des deux mains les courbes de ses fesses, puis les claqua énergiquement en produisant de petits bruits… approbateurs ?
— Tu n’aimes pas que je t’explore ? demanda-t-il, sans doute conscient de la stupeur d’Emma.
— Bien sûr que non !
— Tu peux me rendre la pareille, tu sais.
Il lui prit la main pour la poser sur son torse, puis la fit descendre vers sa taille, une lueur de défi au fond des yeux.
— Non, merci, riposta-t-elle en se dégageant.
Sans lui laisser le temps de protester, il la souleva dans ses bras et l’emporta jusqu’au lit, sur lequel il la jeta.
Elle se releva à toute allure et se rua vers la commode. Il se retrouva posté derrière elle en un clin d’œil à regarder dans le tiroir, corps contre corps, la verge de plus en plus dure. Une chemise de nuit en soie et dentelle rouge dut attirer son attention, car il la souleva d’un doigt, glissé sous les bretelles.
— Celle-ci. Elle me rappellera ce que tu es.
Le rouge était la couleur préférée d’Emma. Qui tenait à se le rappeler, elle aussi.
— Lève les bras.
Ça suffisait comme ça.
— Je suis parfaitement capable de m’habiller toute seule, protesta-t-elle, cinglante.
Il la fit brutalement pivoter vers lui, avant de riposter d’un ton menaçant :
— Ne te montre pas désagréable avec moi, vampire. Tu n’as aucune idée des années de fureur que j’ai accumulées et qui ne demandent qu’à être libérées.
Le regard d’Emma se fixa derrière lui. Sa bouche s’ouvrit malgré elle, car elle venait de repérer les marques de griffes imprimées dans la table de nuit. Il est complètement fou, songea-t-elle.
Elle leva les bras. Ses tantes lui auraient dit, à ce cinglé… À cette pensée, ses sourcils se froncèrent. Ses tantes ne lui auraient rien dit du tout : elles l’auraient déjà tué pour le punir de ce qu’il avait osé faire. Alors qu’elle, elle levait les bras, terrifiée. Elle se dégoûtait. Emma la Froussarde.
En lui enfilant sa chemise de nuit, le colosse lui effleura insolemment les mamelons, aussi durs que s’ils quémandaient ce contact, puis il recula pour l’examiner de la pointe des pieds au corsage de dentelle, en passant par la longue fente qui dévoilait la cuisse.
— La soie te va vraiment bien.
Le grondement rauque de la voix s’accompagnait d’un regard aussi puissant qu’une caresse, auquel elle ne put s’empêcher de réagir.
Un rictus cruel déforma les traits virils. Il savait.
Emma se détourna, rougissante.
— Bon, au lit, dit-il.
— Il n’est pas question que j’y aille avec vous !
— Je pensais qu’on allait partager ce lit, toi et moi. Je suis fatigué, je dormirais volontiers, mais si tu as une occupation plus intéressante à proposer…
Elle s’était toujours demandé à quoi cela ressemblait de partager sa couche avec un amant.
Rien de tel ne lui était jamais arrivé ; elle n’avait jamais senti une autre peau contre la sienne plus d’un instant. Quand le fou l’avait attirée contre lui, emboîtée à lui, la chaleur qu’il dégageait l’avait stupéfiée. Elle qui avait pâli et s’était glacée, affamée, sa température avait remonté. À présent, force lui était d’admettre qu’elle trouvait cette proximité… remarquable. Les poils des jambes viriles la chatouillaient, des lèvres fermes se pressaient dans son cou, elle sentait même contre son dos de puissants battements de cœur.
Voilà, elle comprenait enfin l’intérêt de la chose. Et, sachant ce qu’elle savait enfin, elle se demandait comment on pouvait ne pas avoir envie de partager un lit. L’intrus apportait des réponses aux questions qu’elle se posait et réalisait ses rêves les plus secrets.
N’empêche qu’il pourrait facilement la tuer.
Il avait commencé par la serrer contre lui si fort qu’elle avait eu du mal à se retenir de crier. Non qu’il cherche à lui faire mal – si telle avait été son intention, il n’aurait eu qu’à la frapper –, mais il éprouvait manifestement le besoin de se cramponner à elle, ce qui la plongeait dans un abîme de perplexité. Pourquoi tenait-il tellement à ne pas la lâcher ?
Maintenant qu’il dormait, son souffle était plus régulier. Emma rassembla ses maigres réserves de courage pour lui ouvrir les bras, lentement, ce qui prit au moins une heure… d’après elle.
Si seulement elle avait su glisser, elle se serait échappée en un clin d’œil… Annika avait appris à sa pupille tout ce qu’il y avait à savoir sur la capacité spéciale dont la Horde se servait pour se déplacer. Elle avait prévenu sa protégée que les vampires étaient capables de se téléporter n’importe où, pourvu qu’il s’agisse d’un endroit connu. Les plus puissants pouvaient même emmener quelqu’un d’autre. Emma était censée apprendre à en faire autant. Elle avait essayé, elle n’y était pas arrivée, et s’était découragée. Alors elle avait laissé tomber…
Après avoir enfin réussi à se libérer de l’étreinte, elle se leva prudemment. Debout près du lit, elle jeta un coup d’œil à son occupant… dont la beauté la frappa, une fois de plus. Quel dommage qu’il soit comme il était. Quel dommage qu’elle ne puisse en apprendre davantage sur elle-même – et sur lui.
Elle pivotait, lorsque les grandes mains se refermèrent autour de sa taille. Son ravisseur la jeta de nouveau sur les couvertures, où il la rejoignit aussitôt.
Ça l’amuse, songea-t-elle. C’est un jeu pour lui.
— Tu ne m’échapperas pas. (Il l’obligea à se rallonger, puis se souleva à bout de bras au-dessus d’elle.) Tout ce que tu vas réussir à faire, c’est me mettre en colère.
Il clignait des yeux, mais il n’avait pas l’air de réellement voir ce qui l’entourait. On aurait dit un somnambule.
— Je… je ne veux pas vous mettre en colère, balbutia-t-elle, le souffle court. J’aimerais juste m’en aller.
— Tu ne sais donc pas combien de vampires j’ai tués ? murmura-t-il sans prêter attention à ce qu’elle disait – ou sans l’entendre.
— Non.
— Des milliers. Je les chassais jusque dans leur repaire. (Il passa sur sa gorge le dos de ses griffes noirâtres.) Et puis je leur coupais la tête d’un coup de patte… avant même qu’ils ne se réveillent. (Ses lèvres effleurèrent la peau de sa captive à l’endroit où il venait de promener les griffes. Elle frissonna.) Je tue comme je respire.
La voix au grondement sourd aurait pu appartenir à un amant, tant sa douceur tranchait avec la cruauté des paroles qui l’accompagnaient.
— Vous allez me tuer, alors ?
Il écarta une mèche blonde des lèvres d’Emma.
— Je ne sais pas encore. Avant de te connaître, je n’avais jamais hésité une seule seconde. (Il tremblait, à force de se tenir à bout de bras au-dessus d’elle.) Quand j’émergerai du brouillard… quand j’aurai les idées claires, si je suis toujours persuadé que tu es ce que tu es… qui sait ?
— Que suis-je censée être ?
Il l’attrapa par le poignet pour l’obliger à toucher sa verge gonflée.
— Tu sens comme je suis dur ? Sache que si je ne suis pas en toi, c’est parce que je suis trop affaibli. Pas parce que je m’inquiète pour toi.
Elle ferma les yeux une seconde, gênée, puis chercha à se dégager jusqu’à ce qu’il la lâche.
— Vous me feriez du mal ? Vous me violeriez ?
— Sans hésiter. (Les lèvres de son tourmenteur se retroussèrent. Il la fixait d’un regard intense, quoique toujours aussi vide.) Pour commencer. Mais après, je te ferais tout un tas d’autres choses, vampire.